La situation est inédite. Jamais, dans l'histoire de l'humanité, nous n'avons disposé d'autant d'informations et jamais nous n'avons eu autant de temps libre pour y puiser loisir et connaissance du monde. Nos prédécesseurs en avaient rêvé : la science et la technologie libéreraient l'humanité. Mais ce rêve risque désormais de tourner au cauchemar. Le déferlement d'informations a entraîné une concurrence généralisée de toutes les idées, une dérégulation du « marché cognitif » qui a une fâcheuse conséquence : capter, souvent pour le pire, le précieux trésor de notre attention. Nos esprits subissent l'envoûtement des écrans et s'abandonnent aux mille visages de la déraison. Victime d'un pillage en règle, notre esprit est au coeur d'un enjeu dont dépend notre avenir. Ce contexte inquiétant dévoile certaines des aspirations profondes de l'humanité. L'heure de la confrontation avec notre propre nature aurait-elle sonné ? De la façon dont nous réagirons dépendront les possibilités d'échapper à ce qu'il faut bien appeler une menace civilisationnelle. C'est le récit de cet enjeu historique que propose le nouveau livre événement de Gérald Bronner.
L'imprévu a déserté nos vies, a été banni de nos sociétés, toujours plus avides de planification. Nous laissons ainsi se perdre l'essentiel : la poésie insoupçonnée du quotidien, le goût des rencontres, les découvertes du hasard. Il est encore temps de changer notre regard et de pratiquer un art subtil de la fugue. Il faudrait pour cela transformer ce que nous voyons comme des contrariétés - retards, annulations, pannes - en occasions de bifurquer. Et profiter de ces lieux d'évasion facile que sont les bancs publics, les premiers étages des cafés, les halls d'aéroports, les restaurants vides, les escaliers d'immeubles...
Ce livre développe une conception ouverte et pragmatique de la décroissance, en commençant par rappeler que la récession ou la pandémie ne sont pas la décroissance, à savoir une société équitable et résiliente. L'ouvrage met en lumière les coûts exorbitants de la croissance. Avec un taux de croissance moyen de 3 %, le volume de l'économie serait à la fin du siècle onze fois ce qu'il représente aujourd'hui ; autant dire qu'il ne resterait pas grand-chose de l'habitabilité de la Terre en cours de réduction. Des expériences, des institutions et des politiques publiques s'affranchissent d'ores et déjà de la croissance. Ce livre propose aussi des solutions comme un New Deal vert, le partage des emplois, la diminution du temps de travail (tout en gardant à l'esprit le surcroît de travail qui devrait découler de la décrue énergétique), un revenu minimum garanti lié au Care, les taxes sur les plus hauts revenus, mais aussi la consommation ou l'usage des ressources naturelles, ou encore le soutien à l'économie collaborative.
« Exister dans le système, c'est souvent être assis derrière des vitres, face à un écran. » Des forces nouvelles, mixtes de technique, d'économique et de numérique, ont fait leur apparition. D'une puissance hors norme, ces ultraforces modifient nos systèmes et les fragilisent, produisant le rejet du système, quand ce n'est pas la maladie ou la misère. Ce qui émerge alors est une surenchère entre un système fragilisé et des ultraforces décomplexées. Nous assistons à ses premiers effets : simplisme politique, approfondissement des inégalités, règne de multinationales dominant les États.Face à ces questions, le livre propose une philosophie concrète du système (centrée sur le verre, les chaises et les écrans) et des ultraforces qui en dessinent le cours. Il ouvre la voie à la construction d'un soi plus authentique, moins déterminé par ce qui l'entoure. Comment être soi à l'ère des ultraforces, avec leur cortège de simplicité et de brutalité ?
Au détour d'une conversation, l'auteur prend conscience un beau jour qu'il appartient à une communauté invisible : celle des gens qui marchent seuls, au hasard. Depuis l'adolescence, il s'adonne à cet art qui compte de prestigieux représentants : Rousseau, Baudelaire ou André Breton. Son métier de sociologue l'incite à entreprendre une enquête à la rencontre de ces marcheurs du hasard. Il découvre alors tout un monde, aux personnalités hautes en couleur : la flâneuse, le promeneur du dimanche, la mystique, le romantique, le fugitif, etc. Des liens se tissent, créant un réseau de correspondances d'où ressort une grande impression d'unité. La dernière partie du livre se concentre sur la personnalité de l'Errante, une inconnue rencontrée aux Puces de Saint-Ouen qui développe une approche sensorielle de la marche solitaire. Elle encourage Rémy Oudghiri à retourner sur les traces de ses premières errances à Casablanca. Un voyage qui se révèle décisif pour comprendre l'essence de la marche solitaire et le lien profond qui relie les membres de cette société très secrète.
Ce livre propose dix portraits de célibataires sur le temps long de l'histoire, du Moyen Âge au XXe siècle. Il part du constat d'une invisibilité des célibataires dans les recherches historiques en France : le célibat y a rarement été perçu comme une variable significative de la vie des individus, ou bien il n'est abordé qu'en négatif du mariage. Sans prétendre à la synthèse, l'ouvrage veut présenter différentes « vies de célibat », historiquement et socialement situées. Penser des individus par leur célibat permet à la fois de comprendre ce qu'être célibataire veut dire selon les époques, quelles pratiques sociales et quelles représentations collectives recoupe cette notion. Cette galerie de portraits incarne donc, par des trajectoires de vies, la progressive formalisation et stigmatisation du célibat face à la norme du mariage.
La responsabilité (1920) est un texte fondateur de l'école française de sociologie. Son auteur, Paul Fauconnet, l'un des principaux disciples d'Émile Durkheim, fut longtemps une référence incontournable, avant de tomber dans l'oubli. Ce classique a pourtant une importance théorique décisive : s'appuyant sur des leçons inédites de son maître, Fauconnet y propose une théorie générale et systématique de la responsabilité pénale d'un point de vue sociologique. En étudiant l'imputation de responsabilité comme un phénomène variable suivant les lieux et les époques, l'enquête aboutit à une compréhension révolutionnaire des mécanismes de jugement et de condamnation. Fauconnet quitte alors le domaine juridique et tire de son analyse de la responsabilité criminelle une théorie du libre-arbitre qui déplace le rapport traditionnellement établi entre déterminisme et liberté, redéfinissant du même coup le projet politique de la sociologie. Dans cette première édition commentée, le lecteur est guidé sur le chemin d'une théorie d'une grande actualité dont la portée considérable s'étend du droit pénal au droit social en passant par la philosophie politique et l'histoire de la sociologie.
Cet ouvrage a pour ambition de donner une portée clinique et politique à l'aphorisme « Céder n'est pas consentir ». Il démontre la profondeur de cette distinction, en s'appuyant sur la psychanalyse, la philosophie et la littérature. Le consentement porte toujours en lui une énigme, car consentir, c'est dire « oui », sans savoir, sur fond d'un pacte de confiance avec l'autre. Ce fondement énigmatique du consentement, qui peut aussi comporter une ambiguïté, ne doit pas être confondu avec le forçage. Cet essai pose donc la nécessité éthique d'affirmer une frontière entre « consentir » et « céder » en distinguant l'énigme du consentement comme expérience subjective, de l'expérience du traumatisme sexuel et psychique. Examinant les différents degrés du « se laisser faire », depuis l'expérience de la passion amoureuse jusqu'à celle d'un « se forcer soi-même à faire ce qu'on ne désire pas », Clotilde Leguil montre comment la frontière peut devenir trouble. Traumatisme de guerre, traumatisme intime, comment revenir de ce qui s'est produit ? Comment à nouveau consentir à dire ? S'inscrivant dans l'actualité du mouvement metoo, des collages anti-féminicides, et de la parution du récit événement de Vanessa Springora, cet essai, clinique et politique, fait valoir la nécessité de retrouve une langue à soi, pour pouvoir dire « je » à nouveau.
Le mouvement woke, né aux États-Unis, s'étend aujourd'hui en France. Les entreprises y sont naturellement confrontées en ce qu'elles sont tout à la fois une cible et un vecteur de son développement. Un premier chapitre décrypte le mouvement woke qu'il propose de distinguer de l'idéologie radicale qui en dérive, laquelle est au coeur de l'analyse critique. Dans un second chapitre, s'appuyant sur des entretiens réalisés avec des acteurs du monde économique, les auteurs identifient les manifestations de ce phénomène dans les entreprises en France. Dans un troisième temps, ils projettent les conséquences de la perméabilité de l'entreprise à l'idéologie identitaire, en les mettant en perspective de celles qui sont observées outre-Atlantique. Dans un quatrième temps, ils esquissent une grille de lecture conceptuelle et des propositions d'actions opérationnelles permettant aux dirigeants, managers et DRH de distinguer le bon grain (l'ouverture et la tolérance véhiculées par le mouvement woke) de l'ivraie (l'idéologie radicale identitaire) et d'agir en conséquence.
Tombé presque par hasard sur l'année 1938, un philosophe inquiet du présent est allé de surprise en surprise. Au-delà de ce qui est bien connu (les accords de Munich et la supposée «faiblesse des démocraties »), il a découvert des faits, mais aussi une langue, une logique et des obsessions étrangement parallèles à ce que nous vivons aujourd'hui. L'abandon de la politique du Front populaire, une demande insatiable d'autorité, les appels de plus en plus incantatoires à la démocratie contre la montée des nationalismes, une immense fatigue à l'égard du droit et de la justice : l'auteur a trouvé dans ce passé une image de notre présent. Récidive ne raconte pas l'histoire de l'avant-guerre. Il n'entonne pas non plus le couplet attendu du « retour des années 30 ». Les événements ne se répètent pas, mais il arrive que la manière de les interpréter traverse la différence des temps. En ce sens, les défaites anciennes de la démocratie peuvent nous renseigner sur les nôtres. Récidive est le récit d'un trouble : pourquoi 1938 nous éclaire-t-elle tant sur le présent ?
Les fêtes populaires renforcent le lien social en réunissant les populations dans une effervescence joyeuse. Cet ouvrage étudie la dynamique culturelle et économique des fêtes de Bayonne, l'un des principaux événements festifs européens. La première partie retrace l'histoire des fêtes en soulignant leur caractère culturel singulier et l'impact des militants basques sur son évolution récente, qui aboutit à la « belle fête » conviviale actuelle. La deuxième partie met en lumière les conditions économiques de l'événement et les raisons sociales qui lui permettent d'échapper à l'emprise de l'industrie culturelle. Enfin, l'ouvrage propose une ethnographie du déroulement des fêtes en suivant les différents mouvements de la foule festive. Il se conclut par une esquisse de la sociologie de la joie, émotion qui scelle et magnifie le plaisir d'être ensemble.
Pourquoi lire encore de nos jours cet essai, que Mauss lui-même reconnaissait comme imparfait, et surtout comment le comprendre ? Dans une présentation essentielle, Florence Weber analyse le travail de Mauss, la synthèse des travaux ethnographiques antérieurs, les réinterprétations théoriques qui en ont été faites, les multiples recherches empiriques qui s'en sont inspirées. « Le lire aujourd'hui, c'est prendre la mesure des perspectives qu'il a ouvertes et retrouver à leur racine les principes de l'approche ethnographique des prestations sans marché, un continent mieux exploré aujourd'hui. C'est aussi [...] apprendre à en finir avec le don. »
L'interdit est-il l'ennemi de la liberté ? Celle-ci est-elle toujours du côté du permis ? Cet ouvrage montre que la réponse à ces questions n'est pas si simple. Le consentement et le contrat ne suffisent pas à garantir la liberté, et ils en sont même parfois les fossoyeurs ; à l'inverse, l'interdit ou la dignité n'en sont pas toujours les ennemis. La simple non-ingérence de l'État ne suffit en réalité pas pour assurer l'autonomie des personnes et le pluralisme des choix de vie. Le droit a alors un rôle à jouer pour soutenir la liberté, entendue comme le projet et le processus d'émancipation de tous et de chacun. La liberté des modernes et les droits de l'homme doivent être défendus, mais conforter les acquis de la liberté individuelle suppose de s'intéresser à ce dont elle a besoin pour être instituée, et ce afin d'éviter qu'elle ne se délite ou ne se retourne contre les plus faibles. La liberté ne peut pas être la liberté de détruire ce qui protège et garantit la liberté.
« L'éducation est l'action exercée par les générations adultes sur celles qui ne sont pas encore mûres pour la vie sociale. Elle a pour objet de susciter et de développer chez l'enfant un certain nombre d'états physiques, intellectuels et moraux que réclament de lui et la société politique dans son ensemble et le milieu spécial auquel il est particulièrement destiné. » Ce volume rassemble quatre études exposant les idées maîtresses de Durkheim dont l'intérêt est toujours d'actualité quant aux problèmes abordés et par la manière à la fois raisonnable et optimiste de chercher à les résoudre. Un classique de la pédagogie et de la sociologie.
Tout créateur devrait se poser la question de savoir comment ne pas être complice, volontairement ou involontairement, des systèmes des pouvoirs. Pour cela, il est nécessaire de substituer une éthique des oeuvres à une valeur inconditionnelle de la culture. Dans Penser dans un monde mauvais, Geoffroy de Lagasnerie proposait de placer au coeur des sciences sociales et de la philosophie la production de « savoirs oppositionnels » : comment transposer ces analyses au champ de l'art ? Dès qu'on le confronte au monde et à l'action, que l'on refuse l'autonomisation de la sphère esthétique, il est difficile de ne pas devenir sceptique sur la valeur de l'art : peut-on définir un « art oppositionnel » ? Sur quelles valeurs reposerait-il ? Contre quelles valeurs s'affirmerait-il ? Quelles relations entretiendrait alors l'artiste avec les institutions du monde culturel ?
Pourquoi les mythes du complot paraissent-ils envahir l'esprit de nos contemporains ? Pourquoi le traitement de la politique tend à se « peopoliser » ? Pourquoi se méfie-t-on de plus en plus des hommes de sciences ? Comment un jeune homme prétendant être le fils de Mickael Jackson et avoir été violé par Nicolas Sarkozy a-t-il pu être interviewé dans les journaux de 20 h ?Comment d'une façon générale, des faits imaginaires, inventés ou parfois franchement mensongers arrivent-ils à se diffuser dans l'espace public, à nous faire croire tout et n'importe quoi, à infléchir les décisions des politiques, bref à façonner une partie du monde dans lequel nous vivons ? N'était-il pas raisonnable d'espérer qu'avec la libre circulation de l'information et l'augmentation généralisée du niveau d'étude, les sociétés démocratiques allaient tendre vers une forme de sagesse collective ? Ce livre propose, en convoquant de nombreux exemples, de répondre à toutes ces questions en montrant comment les conditions de notre vie contemporaine se sont alliées au fonctionnement intime de notre cerveau pour faire de nous des dupes.
Quel est l'héritage de Pierre Bourdieu aujourd'hui ? Quel apport son oeuvre fournit-elle à l'élaboration contemporaine de nouvelles théories et de nouvelles politiques ? La pensée de l'auteur de La distinction continue à servir de point d'ancrage à ceux qui entendent fournir des instruments de réflexion et de critique de la réalité.Chacun à leur manière, Annie Ernaux, Didier Eribon, Arlette Farge, Frédéric Lordon, Geoffroy de Lagasnerie, Frédéric Lebaron et Édouard Louis montrent à quel point Pierre Bourdieu constitue une source inépuisable pour aborder des sujets aussi divers et actuels que la domination et la reproduction sociale, les rapports de classe, les théories de la reconnaissance et de la justice, l'amour et l'amitié, les luttes et les mouvements sociaux, la politique et la démocratie, etc. Ces textes s'efforcent de mettre au jour ce que Pierre Bourdieu a rendu pensable et visible bien au-delà de la sociologie, c'est-à-dire dans tous les espaces de la création : la littérature, l'art, l'histoire ou encore la philosophie.Faire vivre Bourdieu, ce n'est pas seulement faire vivre une doctrine. C'est avant tout réactiver une attitude : l'insoumission.
À gauche, l'antiracisme est considéré comme un principe fondamental. Pourtant ces dernières années sa définition a volé en éclats. Un antiracisme dit « politique » a envahi la sphère médiatique et académique, et trouvé un écho important auprès de secteurs militants. Mettant en avant des concepts controversés(« blanchité », « privilège blanc »...), il condamne sans détour ce qui serait un antiracisme universaliste dépassé et déconnecté des nouvelles réalités. Critique de ces approches, le présent ouvrage entend proposer une approche de l'antiracisme qui puise ses racines dans l'histoire du mouvement ouvrier, du socialisme, et du républicanisme. Une approche souvent caricaturée et méconnue, et qui offre pourtant une grande richesse d'analyse permettant l'action. Soit un antiracisme qui retrouve véritablement le chemin de l'émancipation, loin des différentialismes de toute sorte.
On a pu penser un temps qu'avec le progrès des sciences et de la connaissance, l'empire des croyances allait devenir moribond et disparaître. On ne peut qu'être frappé par l'ampleur du démenti que la réalité oppose à cette thèse. En effet, idéologies, croyances pseudo-scientifiques, " persistance " d'un esprit magique et superstitieux, légendes urbaines, théorie du complot, tels sont quelques-uns des éléments qui constituent une bonne part de notre vie quotidienne et démontrent la vitalité de ce vaste empire. Comment comprendre les métamorphoses et les formes actuelles de la croyance ? Pourquoi certaines croyances se diffusent-elles rapidement dans l'opinion publique et d'autres non ? Quels sont les contextes sociaux qui favorisent l'émergence des croyances ? Ce livre propose de répondre à ces questions, et à quelques autres, en mobilisant des exemples divers et d nombreux. Son ambition est de décrire les logiques qui sous-tendent nos adhésions cognitives, les phénomènes collectifs qui les permettent ou qui en émergent. Pour cela, l'auteur part de l'idée que, contrairement à une opinion répandue, l'empire des croyances et celui de la déraison ne se recouvrent pas nécessairement.
À partir de l'expérience de Mariette, sa grand-mère, et du portrait cinématographique réalisé par son frère, le réalisateur Christophe Reyners, Nathalie Zaccaï-Reyners, sociologue, entreprend un parcours réflexif sur les ressorts du soin apporté à nos aînés et les conditions de leur accueil en institution. S'appuyant sur différents travaux de sciences sociales et humaines, mais aussi de philosophie morale et politique, visitant des expériences extraordinaires et innovantes, discutant les fondements des politiques publiques de ces vingt dernières années, ce parcours interroge les conditions de possibilités d'un accueil souhaitable, tant pour les personnels engagés dans le soutien aux personnes âgées que pour le maintien d'un environnement vivant pour ces derniers comme pour leurs proches.
Ce que nous nommons la croissance aujourd'hui est en fait une excroissance, une prolifération qui détruit l'organisme social. D'une vitalité inexplicable et mortelle, ces excès métastasent et prolifèrent à l'infini. Arrivée à un certain stade, la production devient destructrice. Le capitalisme a depuis longtemps dépassé ce point critique. Ses pouvoirs destructeurs produisent non seulement des catastrophes écologiques ou sociales, mais aussi des catastrophes mentales. Les effets dévastateurs du capitalisme suggèrent l'influence d'une pulsion de mort. Sigmund Freud n'a initialement introduit le concept de pulsion de mort qu'après bien des hésitations. Il avoua immédiatement après qu'il « ne pouvait pas penser autrement » car ce concept avait acquis un grand pouvoir sur lui. Penser le capitalisme aujourd'hui ne peut se faire sans l'acceptation de cette pulsion. Traduction de l'allemand par Olivier Mannoni
La notion de guerre civile est utilisée pour qualifier des réalités très hétérogènes allant des guerres internes, souvent à dimension internationale, aux situations de conflits politiques, sociaux et culturels. En interrogeant sa pertinence, ce numéro de Monde commun a pour ambition d'aller au-delà des catégorisations, qu'elles relèvent des sciences sociales ou du droit international. Il propose de revisiter l'actualité des guerres contemporaines, de l'Afghanistan au Yémen, en passant par la Syrie, l'Éthiopie et la Birmanie, en retraçant les lignes de force, les dynamiques et les représentations vernaculaires de ces conflits hors du cadre géopolitique par lequel ils sont souvent perçus. Des parallèles sont en outre tissés entre les guerres de l'ex-Yougoslavie et celle d'Ukraine. Il nous plonge aussi dans les réalités contrastées des États-Unis et de la Colombie où des antagonismes politiques, sociétaux et raciaux attisent les braises de conflits jamais vraiment éteints.
L'ouvrage regroupe cinq textes majeurs de Marcel Mauss, rédigés entre 1921 et 1938, qui explorent la possibilité d'une coopération entre psychologie et sociologie à partir de l'analyse précise d'une documentation ethnographique et historique. Depuis l'expression obligatoire des sentiments dans les cérémonies funéraires australiennes jusqu'à l'histoire de la notion de personne comme catégorie de l'esprit humain, en passant par l'étude du rapport des individus à l'avenir dans différents contextes socio-historiques et par la genèse sociale des relations de hiérarchie et de rivalité, Mauss a tenté de construire avec les psychologues et les anthropologues de son temps, généralement formés en médecine, un modèle de l'homme bio-psycho-social avant de se tourner vers la psychologie historique et l'histoire des techniques. Cet ouvrage montre l'apport décisif de Marcel Mauss à la psychologie sociale.
De la même façon qu'il existe une physique amusante, l'autrice voudrait pratiquer ici une sociologie amusante, sans prétention scientifique. Faisant le constat que la vie quotidienne a davantage changé depuis sa naissance que durant tout le siècle précédent, elle évoque des objets comme la balance romaine, le filet à crevettes, la couchette de seconde classe, les ventouses ou la gamelle de l'ouvrier, qui nous émeuvent comme les témoins oubliés du monde d'hier. Plutôt que de déplorer la disparition d'une réalité qui fut celle de son enfance, elle s'étonne, s'interroge et prend le parti de l'humour. L'ouvrage distraira agréablement les lecteurs. S'il soulève quelques questions, il n'a pour but que de provoquer un sourire tendre et désabusé. L'auteure souhaite qu'il procure un plaisir identique à celui que l'on prend à feuilleter les merveilleux anciens catalogues de Manufrance.