Dénonciation des violences gynécologiques, multiplication des représentations du clitoris, politisation du sang menstruel, ateliers dédiés au plaisir féminin : remettant au goût du jour la revendication des années 1970 de disposer librement de leur corps, une nouvelle génération de féministes, marquée par le moment #MeToo, s'empare aujourd'hui du corps et en fait un moyen d'action pour contester la permanence de l'oppression des femmes.
Lucile Quéré a mené une enquête ethnographique pendant 6 ans en France, en Suisse et en Belgique auprès de collectifs féministes de « self-help » qui contestent l'emprise médicale sur le corps et la sexualité des femmes. Elle analyse ainsi les continuités et les transformations du rapport des féministes au corps des femmes.
Docteure en sciences sociales, Lucile Quéré est chercheuse au Centre d'études du genre à l'Université de Lausanne.
On entend rarement celles à qui ce livre donne la parole. Collégiennes, lycéennes ou jeunes actives, issues de milieux populaires, elles ont grandi et vivent dans la frange rurale de l'Hexagone. Celles qui travaillent ont le plus souvent un emploi au bas de l'échelle.
Yaëlle Amsellem-Mainguy est allée à la rencontre de cette jeunesse a priori « sans problème » et pourtant largement concernée par les grandes évolutions économiques, sociales et politiques du pays. Les « filles du coin » lui ont raconté leur vie quotidienne, leurs relations familiales, leurs amours, les amitiés qui se font et se défont. Elles lui ont décrit leur parcours scolaire, leurs rêves et leurs aspirations, et la question qui se pose à elles dès l'adolescence : partir ou rester ?
Yaëlle Amsellem-Mainguy est sociologue, chargée de recherche à l'Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (INJEP), associée au Centre de recherche sur les liens sociaux (CERLIS) et chercheuse associée à l'Institut national d'études démographiques (INED).
Avec La fin des paysans, Henri Mendras avait décrit à la fois l'exode rural et la mutation du paysan vers l'agriculteur. Le paysan est mort ? Vive le chef d'exploitation sur une ferme familiale et mécanisée. Tel a été, depuis les années 1960, le projet politique de nos campagnes. Qu'en est-il aujourd'hui ? Pourquoi ce mal-être des agriculteurs ?
Bertrand Hervieu et François Purseigle montrent ce modèle agricole s'est peu à peu effacé. En 2020, le chef d'exploitation ne représente plus qu'1,6% de la population active. La production est assurée de plus en plus par des salariés ou des sous-traitants, encadrés par des firmes. Dans les espaces ruraux, les agriculteurs, devenus minoritaires, ne portent plus leur vision du territoire.
Directeur de recherche au CNRS, Bertrand Hervieu est sociologue, spécialiste des questions rurales et agricoles.
François Purseigle est professeur en sociologie. Il dirige le département de Sciences économiques, sociales et de gestion de l'École nationale supérieure agronomique de Toulouse (INP-ENSAT). Il a notamment dirigé, aux Presses de Sciences Po, Le nouveau capitalisme agricole. De la ferme à la firme (2017).
Depuis plus de trente ans, le dialogue social est le fruit d'une institutionnalisation toujours plus poussée au point de supplanter la négociation collective. Cet ouvrage s'intéresse aux rapports entre le dialogue social et le politique, et analyse comment ceux-ci se sont transformés. Si l'entreprise est devenue un acteur doté d'une autonomie contractuelle accrue, ce sont des thématiques nationales voire internationales qui structurent ce dialogue. L'emploi et la performance économique, en particulier, constituent les termes d'un nouveau compromis historique entre les partenaires sociaux et l'État. À côté de ce paradigme dominant dans les relations contractuelles, l'aspiration à une démocratie sociale se fait jour, encouragées par divers textes portant sur la gouvernance des entreprises.
Martial Foucault est professeur des universités en science politique à Sciences Po et directeur du CEVIPOF (Centre de recherches politiques de Sciences Po, CNRS).
Directeur de recherche honoraire au CEVIPOF, Guy Groux est sociologue.
Dans les squats et les bidonvilles des Bouches-du-Rhône, à la gare Saint-Charles de Marseille comme dans les quartiers populaires, Véronique Le Goaziou a suivi le travail de plusieurs intervenants sociaux, éducateurs comme bénévoles, auprès de publics en situation de très grande précarité. Elle donne ainsi à voir les pratiques ordinaires du travail social.
Sur le terrain, les travailleurs sociaux interviennent auprès des populations ne se dérobent pas. Ils n'attendent pas que les conditions soient réunies pour agir - en vérité elles ne le sont jamais. Ils agissent à partir de leur expérience, des bonnes pratiques et des dispositifs existants, convaincus que toute action, même infime, aura des effets. Au risque de voir leur travail social réduit à un soin palliatif...
Véronique Le Goaziou est sociologue et ethnologue. Elle travaille sur la délinquance, la violence, la pauvreté et les politiques publiques relatives à ces questions. Elle est notamment l'auteur, aux Presses de Sciences Po de Viol. Que fait la justice ? (2019).
Aux arguments juridiques et éthiques pressant les entreprises de lutter contre les discriminations, les milieux d'affaires ont opposé leur propre stratégie de la diversité. Dans les plus grandes entreprises, sa mise en oeuvre est confiée aux managers de la diversité et repose sur l'idée que la valorisation des différences et le traitement équitable de la main-d'oeuvre permettrait d'attirer les talents, de conquérir de nouveaux marchés, d'améliorer l'image de l'entreprise, de stimuler la créativité, etc. Que nous disent ces politiques de la diversité du capitalisme contemporain ?
A Paris ou à New York, Laure Bereni montre que ces conduites gestionnaires marquées du sceau de la vertu témoignent d'une articulation entre morale et marché propre à l'ère néolibérale.
Directrice de recherche au CNRS Laure Bereni est sociologue au centre Maurice Halbwachs (ENS-EHESS-CNRS). Ses travaux portent sur le genre, les mouvements sociaux et l'action anti-discriminatoire (parité politique, promotion de la diversité en entreprise). Elle a codirigé avec Catherine Achin le Dictionnaire genre & science politique (Presses de Sciences Po, 2013).
À l'issue de la première guerre mondiale, l'état de la population civile inquiète pouvoirs publics et philanthropes : les familles de milieux populaires font face à un ensemble de « fléaux sociaux » aggravés par la guerre (pauvreté, prévalence de la tuberculose, chute de la natalité, etc.) et qui risquent d'affaiblir le corps social. Nés d'initiatives privées, les premiers services sociaux apparaissent dans les années 1920 et avec eux un métier : assistante sociale.
Lola Zappi s'est immergée dans les dossiers individuels du Service Social de l'Enfance qui, à Paris, agissait pour le compte du tribunal pour enfants. Partant de ces récits, son ouvrage éclaire sous un jour nouveau la construction de l'État social à l'époque contemporaine.
Post-doctorante à l'université d'Harvard, Lola Zappi est chercheuse associée au Centre d'histoire de Sciences Po. Cet ouvrage est issu d'une recherche déjà doublement primée (prix de thèse d'histoire de la sécurité sociale et prix de thèse en lettres et sciences humaines de la chancellerie de Paris).
Sciences Po accueille charque année 15 000 étudiants aux parcours variés et aux origines diverses : presque la moitié d'entre eux viennent de l'étranger. Ils ont déjà un parcours scolaire brillant à leur actif. Ils ont entre 18 et 25 ans, veulent décrocher le diplôme, sont en master voire en doctorat. Les élèves de Sciences Po appartiennent à une élite et le savent. Quelles sont leurs visions du monde ? Quelles sont leurs attentes individuelles et collectives ? leurs valeurs ?Grâce à une enquête menée en avril 2022 auprès de tous les élèves de Sciences Po, Anne Muxel et Martial Foucault brossent un portrait original d'une jeunesse ouverte au monde, attentive à la liberté d'expression, soucieuse de son environnement, aspirant à un épanouissement personnel autant qu'à plus de justice sociale
Martial Foucault est professeur des universités à Sciences Po, directeur du Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF).
Anne Muxel est directrice de recherche CNRS au CEVIPOF. Elle a mené en 2002 une première enquête sur les élèves de Sciences Po : Les Étudiants de Sciences Po. Leurs idées, leurs valeurs, leur cultures politiques.
Dans notre monde, des algorithmes proposent, selon la règle d'optimalité à l'oeuvre, la paire la mieux ajustée possible, entre des personnes à la recherche de relations amoureuses utilisant des applications de rencontre, ou entre des personnes et des logements HLM, des traitements médicaux, des emplois ou encore des formations via la plateforme Parcoursup. Les enjeux résultant de ces processus d'appariement, de matching sont majeurs : moments de bifurcation qui façonnent les trajectoires individuelles, ils constituent une nouvelle manière d'allouer des ressources et de structurer les inégalités.
Cet ouvrage étudie ces processus sociaux afin d'éclairer leur fonctionnement et de comprendre leurs implications sociales et politiques.
Philippe Steiner est professeur de sociologie à Sorbonne Université.
Melchior Simioni est docteur en sociologie économique.
Un déguisement de princesse et un aspirateur pour les filles, un château fort et une voiture radiocommandée pour les garçons... On pourrait penser qu'un choix de jouets aussi stéréotypé appartiendrait au passé. Il n'en est rien. Une sexualisation de plus en plus marquée s'observe dans l'éducation comme dans tous les domaines de la vie sociale.
Ces traitements différenciés ne sont pas systématiquement perçus comme des inégalités. Ils sont justifiés par des croyances en des distinctions essentielles, d'ordre « naturel », entre femmes et hommes. Un ensemble de discours psychologisants, de normes et de symboles en découle, qui a des conséquences multiformes sur les rôles assignés à chacun et chacune.
Alors que la notion de genre a été promue par les sociologues pour révéler les rapports de domination, l'invoquer à tout propos, qu'il s'agisse de féminiser la langue ou de prôner la parité, instille l'idée que femmes et hommes sont toujours, partout et avant tout, non des personnes uniques mais des prototypes de leur groupe de sexe.
Mouvements des « sans », des parapluies, des places, mais aussi Mai 68, grèves contre la « Loi travaille », mobilisations féministes et homosexuelles, contre-sommets altermondialistes, blocages d'universités, gilets jaunes... les mouvements sociaux constituent une composante essentielle et en constante évolution de la vie politique et sociale.
Ce dictionnaire répertorie l'ensemble des concepts clés, traditionnels ou plus récents, pour les appréhender les formes contemporaines de la contestation.
Olivier Fillieule est professeur de sociologie politique à l'Université de Lausanne (IEPHI-CRAPUL) et directeur de recherche au CNRS (CESSP, Paris-1-Panthéon-Sorbonne).
Lilian Mathieu est directeur de recherche au CNRS (Centre Max Weber, ENS de Lyon).
Cécile Péchu est maîtresse d'enseignement et de recherche à l'UNIL.
Portraits de 6 jeunes dans la crise sanitaire à partir d'entretiens réalisés par Yaëlle Amsellem-Mainguy, Julie Couronné et Laurent Lardeux en 2020 et 2021
« Je suis en colère car on a été abandonnés par les profs, abandonnés par l'État » Louisa, 21 ans, étudiante en DUT carrières sociales « Si tu ne travailles pas, t'as pas d'argent c'est le problème quand t'es vacataire » Djénéba, 22 ans, étudiante et vacataire à l'APHP en ménage « Quand ils nous ont confinés, ils ont empêché toutes les possibilités de manifester d'exister » Yanis, 17 ans, lycéen à Paris, membre de Youth for climate « On ne peut pas déconnecter la crise actuelle de ce qui se passe sur la planète » Flora, 21 ans, militante à Alternatiba « Maintenant c'est le flou complet » Coline, 26 ans, secrétaire administrative dans la fonction publique « C'est pas la peine en fait de continuer en restauration » Gautier, intérimaire dans la logistique en Ile-de-France, 19 ans
Yaëlle Amsellem-Mainguy, chargée de recherche INJEP, associée CERLIS-INED, est notamment l'auteure des Filles du coin. Laurent Lardeux est chargé d'études et de recherche à l'INJEP et chercheur associé au laboratoire CNRS Triangle de Lyon. Julie Couronné est chargée d'études et de recherche à l'INJEP.
Tom Chevalier, Joanie Cayouette-Remblière, Benoît Coquard, Adrien Delespierre, Anne Gosselin, Élie Guéraut, Marion Maudet, Patrick Peretti-Watel, Camille Peugny et Arthur Vuattoux
Loin de l'idée reçue selon laquelle nous évoluerions dans un monde flexible, ouvert et fluide, les organisations structurent et s'imposent dans tous les aspects de la vie. À chaque entité ses codes, ses hiérarchies, sa structure, ses règles, procédures ou normes. L'organisation est devenu la réponse privilégiée pour résoudre les problèmes qui requièrent une action collective et une réalité qui produit des effets dans toutes les dimensions de la vie sociale.
Qu'implique le fait de vivre dans une société à ce point organisée ? En quoi celle-ci se distingue-t-elle des sociétés du passé ? Réduit-elle nos libertés ? Conduit-elle à une plus grande uniformité dans nos comportements ? Est-elle plus juste ? Plus démocratique ? Moins inégalitaire ?
Olivier Borraz est directeur de recherche au CNRS à Sciences Po où il dirige actuellement le Centre de sociologie des organisations (CSO). Il est co-auteur de Covid-19 : une crise organisationnelle (Presses de Sciences Po, 2020).
Toutes les femmes sont citoyennes, quelques femmes sont artistes. La citoyenne et l'artiste sont-elles les semblables des hommes ? Oui. Tout autant concernées par la politique et par l'art ? Oui.
Au commencement de l'ère démocratique, initiée par la Révolution française, ces affirmations furent pourtant sources de débats et de polémiques : aux femmes la famille plutôt que la cité, la muse plutôt que le génie, arguaient bien des hommes qui n'étaient pas tous réactionnaires. Deux cents ans après, nous en discutons encore.
L'ouvrage revient sur les conséquences de ce moment fondateur. Il rend compte du travail sans fin de la démonstration de l'égalité, dans une « démocratie exclusive » où chacun - donc chacune - peut théoriquement se voir individu, sujet, citoyen, créateur, un, une parmi tous et toutes.
De Poulain de la Barre, philosophe du XVIIe siècle, à Jacques Rancière, penseur contemporain, avec Virginia Woolf comme avec Simone de Beauvoir, les textes réunis ici montrent à quel point ces questions demeurent essentielles pour la modernité : celle de la jouissance revendiquée, celle de la stratégie subversive, celle de la mesure de l'émancipation des femmes, celle du féminisme comme dérèglement de la tradition occidentale.
La France, à l'instar de nombreux autres pays développés, s'est dotée depuis plusieurs décennies d'une organisation de la gestion de crise. Elle dispose d'un arsenal législatif et réglementaire complet, d'institutions spécialisées et de plans d'action. Elle organise régulièrement des exercices de simulation à l'échelle nationale ou locale. Comment expliquer l'impréparation face à la pandémie de la Covid-19 ?
Les auteurs de cet ouvrage ont recueilli « in vivo » du matériau à chaque étape de la gestion de cette crise. Leur analyse des faits montre que l'exceptionnalité de la situation ne doit pas masquer des défauts de coopération structurels bien connus en sociologie des organisations : cloisonnement, alliances, désaveu du management intermédiaire, etc.
Un retour d'expérience indispensable.
Sociologue, Henri Bergeron est directeur de recherches au CSO (Centre de sociologie des organisations, CNRS Sciences Po).
Directeur de recherches, Olivier Borraz dirige le CSO (CNRS Sciences Po).
Sociologue, Patrick Castel est chargé de recherche au CSO (CNRS Sciences Po).
Sociologue, François Dedieu est chargé de recherche à l'INRAE, membre du LISIS (Laboratoire interdisciplinaire sciences innovations sociétés).
Les personnes en situation de handicap souffrent d'une marginalité persistante face au monde du travail. Les chiffres français sont éloquents : 35 % de taux d'emploi, 19 % de taux de chômage. Pour comprendre un tel constat malgré les nombreuses politiques adoptées depuis le début du XXe siècle, l'auteure présente la situation de cette population sur le marché de l'emploi et passe en revue le foisonnement de dispositifs existants, pour la plupart mal connus et rarement évalués : quotas, droit à la non-discrimination, travail protégé et adapté, aménagements de poste, accompagnement vers et dans l'emploi, reclassement, etc.
Cet état des lieux, éclairé des apports de la littérature internationale, montre l'importance d'un changement des pratiques et des représentations entourant le handicap au coeur des organisations, afin de favoriser l'embauche, la progression et l'épanouissement professionnels des personnes handicapées.
Omniprésente, la discrimination s'insinue dans toutes les étapes du parcours professionnel, de la candidature à l'embauche en passant par la perte d'un emploi et les chances de promotion. Elle se manifeste même dès les années d'éducation, in?uençant l'acquisition de compétences comme les choix de carrière. Les causes, le coût et la mesure des discriminations au travail font l'objet de multiples recherches et expérimentations, dont cet ouvrage novateur présente les résultats pour un large éventail de groupes sociaux : les femmes, les seniors, les LGBT, les minorités ethniques et religieuses, les personnes discriminées en raison de leur apparence physique.Cet ouvrage est aussi le premier à proposer une série de mesures qui, bien au-delà d'une approche strictement punitive, montrent que les discriminations au travail ne sont pas une fatalité et peuvent être combattues.
Depuis vingt ans, le problème climatique s'est hissé au sommet de l'agenda mondial, et un processus multilatéral s'est mis en place pour y répondre. Or, les concentrations de gaz à effet de serre dans l'atmosphère, responsables des dérèglements climatiques, ont atteint un niveau record en 2013.Comment apprécier le bilan de ces négociations ? Revenant sur le traitement politique du changement climatique, du protocole de Kyoto à aujourd'hui, les auteurs proposent une analyse de ces enjeux et d'une gouvernance qui suscite autant d'attentes qu'elle crée de désillusions.Est-il possible de changer de paradigme, alors que le monde connaît des accélérations majeures et se voit confronté à de multiples crises ? Dans quel cadre repenser le défi climatique pour y faire face et l'inscrire dans le champ des futurs ? Une référence sur le changement climatique et les questions stratégiques qu'il pose : rapports entre science et politique et rôle des experts, évolution de la géopolitique du climat, transition énergétique en Europe, aux États-Unis et dans les grands pays émergents, articulations entre problème climatique et globalisation, entre adaptation et développement.
Les pesticides sont des produits dangereux. Pour cette raison, ils comptent parmi les substances chimiques les plus surveillées et ce, depuis des décennies. Des agences d'évaluation des risques contrôlent leur mise sur le marché et assurent une toxico-vigilance de leurs effets sur la santé.Comment alors expliquer l'accumulation de données épidémiologiques qui attestent la sur-incidence de pathologies chroniques - maladies neurodégénératives, hémopathies malignes, cancers - parmi les populations humaines les plus exposées, et en particulier les agriculteurs ?Pourquoi des résultats aussi inquiétants sont-ils si peu de répercussion sur les autorisations de mise en vente ?Le sociologue Jean-Noël Jouzel a mené l'enquête en France et aux États-Unis pour comprendre ce qui conduit les agences d'évaluation à ignorer volontairement certaines données scientifiques lorsqu'elles n'ont pas été élaborées selon les normes de la toxicologie réglementaire.Les industriels ont bien compris le profit qu'ils pouvaient tirer de cette routine normative. Ils ont en effet tout intérêt à suivre ce cadre, disposant par ailleurs des ressources matérielles nécessaires pour s'y conformer.
Une histoire globale (XVIIIe-XIXe siècles)
Les récits de Conrad m'accompagnent depuis mon enfance. À cette époque, j'aimais surtout l'aventure, le bruit et le parfum de la mer. [...] Je pensais avoir mis de côté Conrad
jusqu'à ce que, il y a quelques années, un ami [...] me dise : as-tu remarqué que tes terrains de recherche suivent à peu près les périples de Conrad ?
Le livre de l'historien Alessandro Stanziani ne parle pas des voyages de Joseph Conrad, mais des travailleurs et des asservis que l'écrivain polonais a côtoyés : les serfs de Russie, les salariés et les marins des empires français et britannique, les esclaves et les immigrés de l'océan Indien. Il s'achève au Congo, dans les violences extrêmes perpétrées contre les indigènes par des compagnies coloniales en quête effrénée de profits.
De la pensée des Lumières à l'évolution du droit et à la réalité des conditions de travail, Alessandro Stanziani montre par son approche globale que l'histoire du travail forcé ne peut se comprendre qu'en relation avec celle du travail libre. Les deux aires ne cessent de se superposer et de se répondre mutuellement pour écrire une seule et même histoire encore inachevée, celle d'une difficile émancipation.
Directeur d'études à l'EHESS et directeur de recherche CNRS, Alessandro Stanziani a notamment publié Les Entrelacements du monde. Histoire globale, pensée globale (CNRS Éditions, 2018).
Directeur de recherche CNRS, Alessandro Stanziani est directeur d'études à l'EHESS. Il est notammment l'auteur de Les entrelacements du monde. Histoire globale, pensée globale (CNRS éditions, 2018).
« La victime [est] la grande oubliée du procès pénal. Quiconque assiste à un procès d'assises pour viol s'en rend rapidement compte. »Malgré la sévérité des textes et l'unanime réprobation sociétale, très peu d'affaires de viol sont portées devant l'institution judiciaire, la plupart sont classées, certaines sont requalifiées en simples agressions sexuelles et les rares condamnations semblent plus satisfaire l'opinion publique que les victimes elles-mêmes.Véronique Le Goaziou montre toutes les contradictions qu'il peut y avoir à défendre une cause collective et politique devant une instance qui ne traite que des affaires individuelles. Elle revient en détail sur ce qui motive les décisions des magistrats aux prises avec les délicates questions touchant à la violence, au désir et à la sexualité, et décrit le parcours des victimes tout au long d'un processus judiciaire parfois vécu comme un second viol.Face au traitement strictement pénal des violences sexuelles, qui privilégie la recherche de la faute et la sanction du coupable, ne serait-il pas temps d'écouter les victimes ? De leur demander ce qu'elles attendent de la justice comme de la société ? De trouver d'autres voies pour leur permettre de se reconstruire ?
L'histoire de Mai 68 ne s'est pas écrite qu'à Paris, et ses auteurs ne sont pas que des étudiants. Partout en France, d'autres territoires, d'autres militants ont contribué à faire de la décennie qui suivit l'explosion de mai un « âge d'or des luttes », jouant parfois un rôle de catalyseur au plan national.C'est le cas de Marseille et des Bouches-du-Rhône, sur lesquels cet ouvrage porte un regard singulier. En dépouillant des archives récemment déclassifiées, notamment celles des Renseignements généraux, et en collectant de nombreuses interviews de soixantehuitards marseillais, il exhume une histoire sociale et politique inédite de la région. De la fin des années 1960 au milieu des années 1980, il dévoile une cité phocéenne à l'avant-garde de combats tels que la défense des travailleurs immigrés et la reconnaissance des mouvements féministes, lesbiens et homosexuels.Loin de la vulgate officielle centrée sur quelques figures médiatiques, Marseille années 68 fait revivre les actions de milliers de femmes et d'hommes « ordinaires » qui se sont engagés pour un monde plus juste et qui ont payé lourdement cet engagement, aussi bien sur le plan professionnel que personnel.Il réhabilite une époque et une génération souvent mises en accusation et instrumentalisées à des fins politiques.
Qu'est-ce que la ville fait au cinéma ? Qu'est-ce que le cinéma fait à la ville ?
À travers les exemples de Paris et Marseille, deux métropoles qui font les yeux doux au cinéma, ou encore Versailles, Rome et Los Angeles, l'auteure s'intéresse à ce qui se joue entre un territoire, une ville, et la production d'une oeuvre cinématographique. Dans le temps éphémère où les films s'accomplissent, travailleurs du cinéma et travailleurs de la ville apprennent à combiner leurs actions pour rendre possible les tournages. À mesure que les équipes de film se les approprient, les lieux choisis pour servir de décor ne sont plus figés, circonscrits ni fermés au regard extérieur, ils s'ouvrent, deviennent malléables, se recomposent sans cesse au fil de multiples événements.
Émaillé de témoignages, documents, anecdotes, tranches de vie de plateau, voici un « envers du décor » cinématographique peu usuel, sous le regard d'une sociologue cinéphile qui a observé des dizaines de tournages.
La lutte contre la pauvreté connaît une transformation majeure depuis la fin du XXe siècle. Longtemps au coeur d'une politique sociale inclusive, « les pauvres » sont désormais une catégorie d'individus qu'une administration tatillonne stigmatise, tout en leur dispensant d'insuffisantes prestations. Comment est-on passé d'un idéal d'insertion sociale à l'injonction de traverser la rue pour trouver un emploi ?
Pour comprendre cette évolution, Frédéric Viguier retrace l'histoire de la cause des pauvres depuis 1945. Il décrit notamment le travail mené par des associations comme ATD Quart Monde ou la Fédération des acteurs de la solidarité dans les campements et les cités de transit de l'après-guerre et la façon dont elles ont, au fil des ans, porté cette cause sur les scènes administratives, politiques, médiatiques et scientifiques. Un combat qui s'est souvent soldé par des victoires à la Pyrrhus face aux représentants des hautes sphères de l'État social et à leur conception d'une bonne action publique.
Normalien, agrégé de philosophie et docteur en sciences sociales, Frédéric Viguier enseigne les sciences sociales à l'Institut d'études françaises de New York University.